14.1.09

Nord de la Thaïlande, province de Chiang Rai (text in french)

Bien connue pour la beauté de ses îles, la frénésie de sa capitale, ses massages traditionnels ou encore sa cuisine hautement épicée, la Thaïlande réserve, dans sa province du nord, de nombreuses surprises au voyageur ayant le temps et l’envie de partir à la découverte d’une région caractérisée par une large mixité culturelle.

Bordée à l’ouest par la Birmanie et au nord par le Laos, la province de Chiang Rai est en effet le berceau des tribus montagnardes et d’un mode de vie traditionnel qu’il est possible de découvrir lors de treks. C’est ici que les méandres du puissant Mekong dessinent les contours du célèbre Triangle d or.Les tribus montagnardesIssues de nombreuses vagues d’immigrations venant du Tibet, du sud de la Chine, de la Birmanie et du Laos, les tribus montagnardes sont constituées de trois groupes ethniques : tibéto-birman (Lisu, Lahu, Akha), karéniques (Karen, Kayah) et austro-thai (Hmong et Men). Ces ethnies se retrouvent bien au-delà des frontières thaïlandaises, notamment en Chine et au Vietnam.Chacun d’elles dispose de sa propre langue, de ses propres croyances, costumes et traditions mais leurs modes de vie, adaptés à cette région, présentent de nombreux points communs.Généralement semi-nomades, les tribus du nord de la Thaïlande vivent de la culture du riz et du thé, qui nécessite un aménagement en terrasse des flancs de montagne. Pratiquant également l’élevage, les familles possèdent des troupeaux de vaches, de buffles, de cochons qui naviguent librement à proximité des villages durant la journée. Peu avant la tombée de la nuit, les animaux rejoignent leurs pénates, à savoir un abri sous (ou à côté de) la maison du maître, où les attendent leur festin quotidien.

Les maisons sur pilotis sont construites en bois et en bambou. Elles comportent un foyer dont l’isolation est assurée par une dalle en terre battue.

Ces différentes ethnies sont de plus en plus confrontées aux conséquences du développement que connaît le reste du pays – un développement qui implique d’importants changements de mode de vie et de mentalité.Equipés de panneaux solaires suite à un programme mis en place par Thaksim, l’ancien Premier Ministre thaïlandais, les villageois peuvent désormais bénéficier d’un éclairage électrique, écouter la radio, regarder la télé ou encore animer leur soirée par un très apprécié karaoké. La plupart des villages disposent d’un accès par la route, le réseau s’étant largement étendu, ce qui rend moins pénibles les trajets des montagnards (souvent chargés de lourds fardeaux maintenus au niveau du front) et beaucoup plus rapides les connections entre villages et vallées. Cela fait aussi la joie des jeunes, qui, juchés sur leurs deux-roues rutilants, peuvent rouler des mécaniques et rivaliser avec la jeunesse urbaine.

En raison de la déforestation et du manque criant d’écoles, on assiste au regroupement des villages qui descendent peu à peu vers les vallées. Le TrekSuivant des itinéraires de deux à cinq jours, randonner dans la région ne présente pas de réelles difficultés physiques. On monte et on descend sans cesse d’un flanc à l’autre, entre 1000 et 1400 m d’ altitude, le long de rivières à l’ombre de bambouseraies ou de bananeraies sauvages, en suivant des crêtes dégagées et en traversant des rizières, des forêts de teks ou des plantations d’arbres à lychees. Propices à des haltes rafraîchissantes, les cascades sont légion. Maintes sources chaudes attendent aussi ceux qui préfèrent les bains relaxants.
Vous aurez peut-être l’opportunité de croiser un monastère bouddhiste reculé, où les moines retirés dans des "huttes monoplace" méditent toute la journée dans le calme de la forêt. Même si les villages les mieux nantis se tournent petit à petit vers le tourisme et commencent à aménager logements et boutiques à souvenirs, le gîte reste des plus spartiates : une paillasse chez le chef du village. Quant au couvert, il est assuré par le cuisinier qui suit le trek, investissant la cuisine de chaque famille d’accueil lors des pauses déjeuner et dîner.Votre guide vous sera très précieux durant les veillées animées, au cours desquelles on vous contera mille et une histoires nécessitant une traduction avisée.Ne soyez pas étonnés par la présence d’hélicoptères militaires dans la région. Ils surveillent le trafic d’opium, très vivace, la récolte du pavot étant réalisée mi-février.Si vous choisissez de vous adresser à une agence locale, prenez votre temps et entretenez-vous avec les guides afin d’exprimer au mieux vos attentes en matière de randonnée. Les agences de Chiang Rai vous proposeront d’abord un trek d’une ou deux journées, comprenant 4X4, balade en éléphant et quelques heures de marche. Le mot "trek" est souvent dévoyé et ces tours s’adressent en priorité à des voyageurs pressés, désireux d’avoir un aperçu rapide de la région. Assurez-vous de l’itinéraire, du choix des villages que vous traverserez et où vous stopperez pour la nuit. Evitez si possible la visite des villages Palaung, femmes-girafes, réfugiées de Birmanie, dont l’exhibition touristique est on ne peut plus pathétique.
Le Triangle d’orConstitué géographiquement par la pointe de l’état shan birman, au confluent de la rivière Vam Ruak et du Mekong, la Thaïlande et le Laos, le Triangle doit sa sulfureuse réputation au trafic d’opium, d’amphétamines et d’héroïne, produits massivement dans la région. Bien que le gouvernement thaïlandais mène aujourd’hui une guerre ouverte aux trafiquants afin de préserver les populations locales de l’addiction et de limiter le marché noir, les réseaux existent toujours, à en juger la densité de population pénitentiaire des centres de rétention de Chiang Rai.On peut profiter du point de vue sur le Triangle d’or depuis Sop Ruak devenu un passage obligé des circuits touristiques. Des balades en bateau y sont proposées. On peut admirer la grande barque de Bouddha depuis une esplanade d’un genre "Disneyland bouddhiste", et se faire photographier sur des éléphants en béton, façon couple royal.La halte présente peu d’intérêt, en dehors de la visite des deux musées consacrés à l’opium. A quelques kilomètres de là, se dresse un complexe constitué de centaines de boutiques qui, pour l’instant, sont encore vides. Dans le même ordre d’idée, sur l’autre rive, côté Laos, on aperçoit un immense chantier annoncé comme future zone franche, révélateur d’un fort désir de développement touristique.

Les villes frontalièresLes postes-frontières qui jalonnent le périmètre permettent d’incessants échanges commerciaux. De multiples bateaux, aux styles et aux pavillons variés, créent un étonnant ballet sur le Mekong, dont la couleur et le niveau dépendent de la saison. La ville frontière de Mae Sai, dont le pendant birman est Tachileik, abrite un marché fascinant : jade, laque, fruits confits, noix de bétel, copies chinoises et pierres précieuses raviront chineurs et curieux. Ici on passe facilement la journée d’un côté ou de l’autre, pour travailler, vendre ou acheter.Chiang Saen, ville d’un ancien royaume du 14ème siècle, accueille les navires chinois et laotiens qui chargent et déchargent leurs tonnes de cargaison en haut de larges marches aménagées sur les rives du Mekong. Face au fleuve, des enfilades de boutiques proposent quincaillerie et matériel agricole : grillages, pinces, taille-haies, pots de peinture... Tous ces commerces s’adressent surtout aux clients laotiens, très demandeurs en produits manufacturés faisant défaut dans leur pays, dont le développement dépend cruellement des importations. Pour ce qui est du transport des passagers, on peut, par exemple, embarquer en bateau à Chiang Khong pour voguer vers Pakbeng, Luang Mantha et Luang Prabang, ville historique du Laos, au gré d’une très contemplative descente de deux jours sur le Mekong. Bonne route.

Merci Jérôme pour la correction !